dimanche 31 mai 2015

Hommage à Dante Alighieri

Nous restons dans le thème de l'Italie, poursuivi tout au long de ce mois de Mai, car cette année 2015, on célèbre le 750e anniversaire de la naissance du poète, écrivain et homme politique florentin  :
 
portrait de Dante peint par Sandro Botticelli (1495)





armoiries de la famille ascendante à gauche, et descendante
à droite, de Dante Alighieri














Dante Alighieri


 
Deux pièces de monnaies en euros avec le portrait de Dante , une d'usage courant émise par l'Italie
 (à gauche) et une commémorative dans la République de Saint-Marin (à droite).


Durante degli Alighieri alias Dante Alighieri ou simplement "Dante" 

• né à Florence (Italie) en 1265 (en mai ou début juin, la date exacte est inconnue).
• mort à Ravenne (Italie) le 14 septembre 1321.

La maison natale et musée consacré à Dante à Florence, avec les deux blasons gravés dans la pierre

 Issu d'une famille de la petite noblesse, Dante Alighieri naquit à Florence dans la seconde quinzaine du mois de mai 1265. Sa mère mourut alors qu'il était âgé de treize ans, et son père décéda quand il en avait dix-sept. L'événement le plus important de sa jeunesse fut sa rencontre, en 1274, avec Béatrice, jeune femme qu'il aima et qu'il exalta comme un symbole de la grâce divine dans la Vita nuova (littéralement, « la Nouvelle Vie ») et plus tard dans la Divine Comédie, son œuvre la plus connue. Célèbre par ce prénom emblématique, celle qui inspira Dante ne possède pas d'identité historique certaine, mais des chercheurs l'ont identifiée à Beatrice Portinari, une femme de la noblesse florentine qui mourut en 1290 à l'âge de vingt ans. Si l'on en croit ses œuvres, Dante ne la connaissait pas ; il l'aperçut seulement à trois reprises, sans jamais lui adresser la parole.


timbre italien de 1932 ( armoiries du royaume d’Italie)
On sait peu de choses sur l'éducation que reçut le poète, sinon qu'il séjourna à Bologne aux environs de 1285, pour y accomplir des études supérieures. Quoi qu'il en soit, son œuvre révèle une érudition telle qu'elle couvre presque tout le savoir de son époque. Dante fut particulièrement influencé par les travaux du philosophe et rhétoricien florentin Brunetto Latini, qui tient d'ailleurs une place importante dans la Divine Comédie. Il fréquenta nombre de poètes et se lia en particulier avec Guido Cavalcanti et Cino de Pistoia. Florence était alors une des cités les plus puissantes de l'Italie, mais elle était également divisée par des conflits de pouvoir entre les partisans de deux puissantes familles, les guelfes et les gibelins (voir Guelfes et gibelins). Dante fut d'abord partisan des guelfes et, en juin 1289, il se trouva aux côtés de l'armée des guelfes de Florence lors de la bataille de Campaldino. Dans cette bataille, les Florentins triomphèrent d'une manière décisive des troupes des gibelins de Pise et d'Arezzo, mais les vainqueurs se divisèrent bientôt entre « noirs » et « blancs » — c'est d'ailleurs comme « blanc » que Dante devait être plus tard condamné et banni. À cette époque, Dante épousa Gemma Donati, qui était issue d'une famille guelfe jouissant d'une position très importante à Florence.
La Divina Commedia di Dante ( la Divine Comédie de Dante) - tableau de Domenico di Michelino (1417–1491) -
il Duomo  / cathédrale Santa Maria del Fiore à Florence
Durant les quelques années qui suivirent — de 1295 à 1301 environ —, Dante participa activement à la vie politique tourmentée de Florence ; des registres de 1295 indiquent qu'il occupa plusieurs fonctions dans l'administration. Il fut notamment envoyé (1300) en mission diplomatique à San Gimignano, petit village toscan et, la même année, il fut élu au Conseil avec cinq autres personnes, en qualité de prieur, c'est-à-dire de magistrat, mais il n'occupa ce poste que pendant deux mois. La rivalité entre les deux factions qui divisaient les guelfes à Florence s'intensifia durant la période de son mandat. Les « noirs », opposés au pouvoir impérial, considéraient le pape comme un allié, tandis que les « blancs » voulaient rester indépendants du pape comme de l'empereur. Afin de préserver la paix dans la cité, le Conseil décida d'exiler les dirigeants des deux partis. Mais, par l'entremise du pape Boniface VIII, les chefs des « noirs » purent regagner Florence à la fin de 1301, et s'emparèrent du pouvoir. En mars 1302, alors que le poète était en mission à Rome auprès du pape, ils le bannirent de la ville pour une durée de deux ans et le condamnèrent à une lourde amende. Comme Dante était dans l'impossibilité de régler la somme demandée, la sanction fut commuée en peine de mort s'il revenait dans sa ville natale. Après cet épisode, Dante garda à tout jamais le sentiment d'avoir été abusé par Boniface VIII.

armoiries de la famille ascendante de Dante Alighieri à gauche : "Parti d'or et de sable, à la fasce d'argent",
 et de la famille des descendants à droite : "D'azur, au demi vol senestre d'or posé en pal". 
  dessins extraits de l'étude de Carlo Padiglione : "L'arme di Dante Alighieri", éditeur Nobile, Naples (1865) - consultable en ligne ici → (en italien). Un résumé de l'arbre généalogique de Dante Alighieri est aussi proposé sur Wikipedia, toujours en italien, ici → , illustré avec les blasons dessinés dans le précédent ouvrage.
Il passa ses années d'exil à Vérone, ainsi que dans d'autres villes du nord de l'Italie, mais on sait qu'il séjourna à Paris entre 1307 et 1309. Ses convictions politiques se modifièrent : embrassant finalement la cause des gibelins, il espérait désormais voir émerger une union européenne gouvernée par un empereur éclairé.

Les aspirations politiques du poète furent stimulées par l'arrivée en Italie d'Henri VII de Luxembourg, empereur du Saint Empire romain germanique (1310), dont l'objectif était de placer l'Italie sous sa souveraineté. Dans cette période d'intense activité politique, Dante écrivit à de nombreux princes et dirigeants politiques italiens pour les exhorter à accueillir Henri VII, considérant la suzeraineté de celui-ci comme le moyen de parvenir à résoudre les conflits aigus entre cités. Le décès de l'empereur, survenu à Sienne en 1313, détruisit tous ses espoirs. C'est probablement durant le séjour d'Henri VII en Italie qu'il rédigea un traité en latin, la Monarchie universelle (v. 1313), qui est un exposé de sa philosophie politique ; il soutenait encore l'idée d'une séparation totale de l'Église et de l'État.


portrait gravé,  signé Francesco Allegrini (1761)  avec armoiries,
 collection de la Bibliothèque Nationale de France -  Paris
 détail des armoiries : "Parti d'or et de sable, à la fasce d'argent"

En 1316, les autorités de Florence proposèrent au poète de regagner la cité, mais les conditions offertes étaient celles généralement réservées aux criminels amnistiés. Dante refusa violemment cette proposition, affirmant qu'il ne reviendrait dans sa ville natale qu'avec toute la dignité et tous les honneurs qui lui étaient dus. De fait, il demeura en exil jusqu'à la fin de sa vie, et passa ses dernières années à Ravenne, où il mourut dans la nuit du 13 au 14 septembre 1321. Depuis, Ravenne ne s'est jamais dessaisie de ses restes, malgré la volonté des Florentins de le voir inhumé en leur cité. À défaut, sa ville natale a élevé dans l'église de Santa Croce un cénotaphe à sa mémoire.



L'ŒUVRE

La première œuvre littéraire d'envergure de Dante, la Vita nuova, fut rédigée peu après la mort de Beatrice, entre 1291 et 1293. Composé de sonnets et de canzoniere insérés dans un commentaire en prose, ce texte rend compte du cheminement amoureux du poète depuis son rêve prémonitoire annonçant la mort de sa bien-aimée jusqu'à la disparition effective de Beatrice, et se poursuit jusqu'à sa décision d'écrire une œuvre digne de la mémoire de la belle. La Vita nuova révèle expressément l'influence de la poésie courtoise des troubadours et trouvères provençaux, en même temps qu'elle représente l'œuvre la plus accomplie du dolce stile nuovo (littéralement, « nouveau style doux ») caractéristique de la poésie florentine vernaculaire (c'est-à-dire écrite en italien) du XIIIe siècle. Toutefois, cet ouvrage va au-delà de la tradition provençale car le poète ne s'y attache pas seulement à peindre son idéal amoureux, mais il propose de donner une signification spirituelle à l'objet même de son adoration. L'intensité constante des sentiments qui animent la Vita nuova fait de cette œuvre l'un des plus grands et des plus fervents poèmes qui soient.

C'est durant les premières années de son exil que Dante écrivit un ouvrage en latin, laissé inachevé, le Banquet (v. 1304-1307), et De l'éloquence en langue vulgaire (1304-1305), traité qui souligne les avantages de la langue italienne ; si Dante y défend la langue vernaculaire (c'est-à-dire l'italien), qu'il présente comme un moyen d'expression littéraire, il essaie également d'établir des critères relatifs au bon usage de l'italien écrit. Il conclut son livre avec un chapitre consacré à la critique de la poésie italienne. Quant au Banquet, il était à l'origine prévu en quinze volumes, afin de constituer une synthèse de toutes les connaissances de son temps ; Dante ne parvint pas au-delà du quatrième volume, mais son projet ambitieux montre bien sa passion du savoir, de tous les savoirs.


Parmi les œuvres mineures que Dante écrivit dans la dernière période de sa vie figurent un texte intitulé Question de l'eau et de la terre (1318) et deux églogues. Le premier de ces ouvrages, tous trois rédigés en latin, est un traité cosmologique, sujet qui intéressait vivement les intellectuels de l'époque. Pour Dante, il s'agissait de s'y interroger sur l'existence d'un endroit à la surface de la mer, ou de toute autre étendue d'eau, qui soit plus élevé que la surface de la terre. Quant à ses Églogues (1319), elles doivent beaucoup au poète romain Virgile, dont Dante reconnaissait l'influence, de même que celle d'Horace et d'Ovide.

belle gravure du portrait de Dante ( Italie)
 collection de la Bibliothèque Nationale de France -  Paris
armoiries de la famille de Dante Alighieri , version moderne


  La Divine Comédie 

Probablement commencée aux environs de 1307, pendant l'exil, la Divine Comédie, chef-d'œuvre de Dante, fut achevée peu avant sa mort.

Son titre initial était Comédie ; le choix paradoxal de ce terme pour évoquer le monde des morts vient de ce que le périple raconté ici se termine au paradis, trouvant ainsi une fin heureuse : le parcours atteint son apogée dans la vision de Dieu et dans la dissolution totale de la volonté individuelle. C'est dans l'édition de 1555 qu'on ajouta pour la première fois au titre l'adjectif « divine ».
enluminure représentant l'enfer -  Divina Commedia, prima cantica : Inferno. Con l'Ottimo Commento  (Dante) - folio 1vo - manuscrit italien - Date d'édition : 1301-1400 (Florence) - Bibliothèque Nationale de France -  Paris

Ce récit allégorique en vers, empreint d'une grande puissance dramatique, relate le voyage imaginaire qui conduisit le poète en enfer, au purgatoire et au paradis. Ces trois lieux fournissent d'ailleurs la structure de l'ouvrage, puisque celui-ci est divisé en trois parties : «l'Enfer », « le Paradis » et « le Purgatoire ». Dans chacun de ces trois mondes, le poète rencontre des personnages mythologiques, historiques ou des contemporains : chacun symbolise une faute ou une vertu spécifique, religieuse ou politique. Le poète décrit avec minutie les punitions qui sont infligées aux pécheurs et les récompenses décernées aux vertueux. C'est Virgile, symbole ici de la raison, qui guide Dante en enfer et au purgatoire, mais c'est Béatrice, manifestation et instrument de la volonté divine, qui entraîne le poète au paradis. L'univers y est saisi dans sa totalité, de l'infime à l'incommensurable, du naturel parfois trivial au surnaturel souvent stupéfiant : la Divine Comédie est un tout.


blasons et noms des ascendants de Dante Alighieri  - pages extraites de l'étude de Pietro Fraticelli : "Storia della vita di Dante Alighieri", éditeur G. Barbera Editore, Florence (1861) - consultable en ligne ici → (en italien).
Chaque partie de la Divine Comédie comprend trente-trois chants. Dante rédigea chacun d'eux en terza rima, c'est-à-dire en tercets avec un jeu des rimes particulier (où le premier vers rime avec le troisième, tandis que le deuxième fournit les rimes extrêmes du tercet suivant) (voir Versification). Parce qu'il destinait son œuvre à ses contemporains, il n'est pas étonnant que le poète ait choisi d'écrire son chef-d'œuvre en italien plutôt qu'en latin, langue qu'il jugeait passéiste, et en outre réservée aux lettrés.

enluminures  -  1ère page de texte de la  Divina Commedia, prima cantica : Inferno. Con l'Ottimo Commento  (Dante) - folio 3r - manuscrit italien - Date d'édition : 1301-1400 (Florence) - Bibliothèque Nationale de France -  Paris
L'ouvrage fournit un résumé des conceptions politiques, scientifiques et philosophiques de l'époque interprétées par Dante, et peut être lu à quatre niveaux : littéral, allégorique, moral et mystique. Il est vrai aussi que la Divine Comédie demeure extraordinaire parce qu'elle met en scène la théologie chrétienne médiévale, mais sa grandeur réside davantage dans la pluralité de ses significations que dans la dimension magistrale de ses qualités théologiques, poétiques et dramatiques. Dans son interprétation la plus générale, le voyage imaginaire de Dante peut se concevoir comme une allégorie de la purification des âmes, menant à la paix intérieure grâce aux pouvoirs de la raison et de l'amour, qui servent de guides tout au long du cheminement.


timbre italien du 8e centenaire de la naissance
 de Dante, émis en 1965
  Avant même le XVe siècle, de nombreuses villes italiennes mirent en place des chaires universitaires entièrement consacrées à l'étude de la Divine Comédie. Au cours des siècles qui suivirent, l'invention de l'imprimerie permit de réaliser plus de quatre cents éditions italiennes de l'œuvre. Aujourd'hui, la Divine Comédie a été traduite en plus de vingt-cinq langues.
  Le poème, par sa puissance d'évocation, inspira particulièrement les artistes : ainsi parurent des éditions luxueuses, illustrées par de très grands peintres italiens tels que Botticelli ou Michel-Ange et plus près de nous Eugène Delacroix, William Blake ou Gustave Doré. De grands compositeurs s'y intéressèrent également : Rossini et Robert Schumann mirent en musique plusieurs parties de l'œuvre et Franz Liszt en fit le sujet d'un poème symphonique.
timbre émis en 1965 par la République de Saint-Marin
 pour le 8e centenaire de la naissance de Dante.

Le chef-d'œuvre de Dante et son imagerie ont imprégné les œuvres de très nombreux poètes, notamment celles d'Ezra Pound, de T. S. Eliot, de Gabriele D'Annunzio, de Paul Claudel et d'Anna Akhmatova. Autant d'auteurs grâce à qui les multiples aspects de la Divine Comédie ne cessent de s'enrichir de nouvelles interprétations.






              Herald Dick
 

mardi 26 mai 2015

Il Giro d'Italia 2015 - le Tour d'Italie en blasons -
Trentin-Haut Adige - Lombardie - Tessin - Vallée d'Aoste - Piémont et arrivée à Milan

gonfalon de la ville de Turin
Dernier rendez-vous sur ce blog (voir le précédent épisode → ICI ) pour une illustration originale de cette grande épreuve cycliste de printemps.
 Les deux premières semaines nous ont fait découvrir un grand nombre de régions et de provinces en alternant les départs et les arrivées dans des villes côtières, de plaine ou de moyenne montagne. Nous avons franchi tout au plus six cols entre 1000 et 1500 m d'altitude. Mais cette dernière semaine risque de tout changer dans les classements de la course et aussi amener quelques surprises dans notre approche héraldique du parcours.
   En effet ce seront cinq étapes émaillées de cols vertigineux dans les massifs des Alpes Rhétiques méridionales, des Alpes Bergamasques, le Massif du Cervin, puis les Alpes Piémontaises. Enfin le dernier jour, quand les jeux seront faits à 99%, une dernière étape de plaine pure, reliera les deux grandes métropoles du nord : Turin et Milan.


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Voici la carte générale du tracé, en rappel, et plus bas: les six nouvelles étapes concernées par ce sujet.
drapeau de la région de Lombardie
drapeau de la province autonome de Trente
drapeau de la région de la Vallée d'Aoste
drapeau de la région du Piémont
drapeaux du canton du Tessin et de la Suisse



Région autonome du Trentin-Haut Adige
 Regione autonoma Trentino-Alto Adige

Région autonome du Trentin-Haut Adige  : " Écartelé en 1 et 4 : d'argent à l'aigle de sable, bordée de langues de feu de gueules, becquée et membrée d'or, chargée d'un kleestengel du même (pour Trente);  en 2 et 3 : d'argent à l'aigle gueules, becquée et membrée d'or, lampassée de gueules, chargée d'une tige de kleestengel d'or (pour Bolzano)".
• Le style héraldique de ces armoiries est typiquement germanique, épuré et dépourvu de tous les ornements extérieurs habituels des armoiries civiques italiennes : couronnes, soutiens, supports, devises.
• Jusqu'en 1918, la région actuelle formait les provinces autrichiennes du Südtirol (Tyrol du sud) et du Welschtirol (Trentin), avant d'être rattachées à l'Italie à la fin de la Première Guerre mondiale, consécutif au démantèlement de l'Empire austro-hongrois.
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16e étape - Mardi 26 Mai 2015 : Pinzolo - Aprica
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Province 
de Trente / Trento = TN
 (Région du Trentin- Haut-Adige)


Pinzolo (TN)


Province autonome de Trente :  voir descriptif des armoiries dans le précédent volet →

Pinzolo : "D'argent à la branche de rhododendron à trois fleurs, au naturel". Couronne et ornements extérieurs des communes italiennes.

Province de Sondrio = SO
 (Région de Lombardie)


Aprica (SO)
Aprica : Blason non héraldique (trop de choses "au naturel") : d'azur à la chaîne de cinq pics montagneux, terrassés par une plaine herbeuse, surmontés d'une fleur d'edelweiss tigée, posée en bande, le tout au naturel.  Couronne et ornements extérieurs des communes italiennes.

Province de Sondrio :  Comme de nombreuses provinces italiennes, c'est un "puzzle" formé des blasons de plusieurs villes principales, cinq en l'occurrence, qu'il serait fastidieux de blasonner : "Écartelé, en 1 : Tirano ; en 2 : Bormio ;  en 3 : Chiavenna  ; en 4:  Morbegno;  et sur le tout : la ville de Sondrio. Couronne et ornements extérieurs des provinces italiennes.



Région de Lombardie :  Encore une fois, on pourra regretter l'usage de ce logo bizarre au lieu des armoiries conventionnelles qu'un bon nombre de régions ont adopté. Mais ici, en raison de la force symbolique (insoupçonnée) de ce signe en forme de croix ronde et oblique, il faut bien admettre
La Rosa Camuna, symbole rupestre de la civilisation des Camuni
photo prise à Nadro, dans le Val Camonica.
 
l'évidence quand on a l'explication, que le logo était une bonne solution. Il est présent également dans le drapeau régional (voir plus haut).
 Ce motif vaguement floral rappelle la préhistoire de la région. La "Rosa camuna" (la rose camuna) c'est son nom, est caractéristique d'un peuple le l'Âge de fer, les Camuni (Camunni en français). Elle a été trouvée sur plusieurs gravures rupestres de la région, notamment à Nadro, dans le Val Camonica, près de Brescia. Le logo de la Rosa camuna a été réalisé par Pino Nappe, Bob Noorda, Bruno Munari et Roberto Sambonet (oui : ils s'y sont mis à quatre, un pour chacune des branches !) en 1975, et est devenu le symbole de la Région de Lombardie, qui est dépositaire de la marque et réglemente son utilisation. 




17e étape - Mercredi 27 Mai 2015 : Tirano - Lugano
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Tirano (SO)
 Tirano : "Parti d'argent et de gueules, au château d'or brochant à trois tours et deux merlons crénelés à la Gibelin (voir explication ici → ), ajouré et ouvert de sable, surmonté d'une aigle du même, becquée d'or, lampassée de gueules".  Couronne et ornements extérieurs des villes italiennes.
• sur de nombreuses représentations, l'aigle est en plus couronnée d'or. Et le château est blasonné "au naturel" en italien, c'est-à-dire de la couleur de la pierre, ce qui permet beaucoup de nuances !

Lugano (TI)
(Suisse)
Canton du Tessin = TI
Cantone Ticino (Suisse)

Lugano : "De gueules à la croix d'argent, cantonnée des lettres capitales romaines L V G A , une dans chaque canton, du même métal".
• Sur le sens du graphisme et de l'acronyme LVGA, il existe de nombreuses hypothèses, mais il n'y a aucune explication authentifiée. La représentation la plus ancienne de l'emblème de la ville (champ de gueules et croix d'argent avec les initiales LVGA) date de 1588 et est apposée sur un certificat de "bons services rendus" délivré par la ville au bailli et capitaine régent Sebastiano von Beroldingen. Ce document est visible au musée d'Altdorf (canton d'Uri).
L'utilisation du V à la place du U, selon la coutume des inscriptions romaines, fait croire que l'origine est romaine, comme pour indiquer l'acronyme d'une légion cantonnée dans le secteur par exemple : "Legio V (cinquième légion) Gaunica Auxiliares", une légion auxiliaire de l'Empire romain. Mais cette explication, séduisante, semble sans fondement historique.
Une autre interprétation avancée plus douteuse encore est que l'abréviation LVGA soit un acronyme pour la  devise : "La Vera Giustizia Antica" ( la vraie justice ancienne).
La version actuelle de l'administration municipale, comme en témoignent les quelques copies de documents datés 1208 et 1209 (les originaux ont été perdus) déposés dans les archives du diocèse de Lugano, est que LVGA n' est rien de plus que l'abréviation du nom de la ville même.

Canton du Tessin : "Parti de gueules et d'azur".
• particularité partagée avec le canton de Lucerne, parmi les 26 cantons suisses  : la configuration du drapeau (voir plus haut : deux bandes horizontales) est différente de celle des armoiries (parti, donc deux pièces verticales).  




18e étape - Jeudi 28 Mai 2015 : Melide - Verbania

Verbania (VB)




Melide (Tessin / Suisse)

Melide : Écu de type espagnol : "D'azur à l'ancre d'or".
ancien blason de la ville
de Pallanza en 1865.
• une ancre marine au milieu des Alpes ! mais oui c'est possible: car c'est un village et une commune situés au bord du lac de Lugano, la petite mer intérieure du canton du Tessin ...


Verbania: "Coupé, au premier : d'or à l'aigle couronnée de sable; au deuxième d'argent, au chêne au naturel, terrassé de sinople". Couronne comtale et ornements extérieurs des villes italiennes.
• ce blason est repris sur celui de Pallanza (ci-contre), ville qui a fusionné avec Intra en 1939 pour devenir la commune de Verbania, qui tient son nom du lac Verbano, l'autre nom du lac Majeur, sur lequel elle est située.

Province de Verbano Cusio Ossola = VB
 (Région du Piémont)


 Province de Verbano-Cusio-Ossola : Écu samnite (ou français) moderne : "Coupé, au premier, de gueules à la clé d'or renversée, accompagnée de deux monts à l'italienne de trois coupeaux d'argent, tous posés sur la division;  au deuxième, d'argent à trois bandes d'azur entées seulement par le haut". Couronne et ornements extérieurs des provinces italiennes.
• le premier quartier symbolise avec la clé le Val d'Ossola, passant entre les montagnes vers le col du Simplon : porte de l'Italie depuis la Suisse. 
blason des Borromée (1715)
• le second quartier s’inspire avec les vagues de l'enté, et les couleurs, des eaux du lac Majeur (ou de Verbano) et du petit lac d'Orta (ou de Cusio) tout proche.
 Les bandes entées azur et argent font référence également aux armes originelles de la grande et ancienne famille aristocratique lombarde de Borromée (Borromeo) qui a eu historiquement, et a encore une grande influence sur ce territoire autour du lac Majeur.


Région du Piémont : L'emblème de la Région du Piémont a une forme carrée avec une croix d'argent sur ​​un champ de gueules, une bordure d'argent et un lambel d'azur à trois pendants. Plus qu'un logo, c'est bien un objet héraldique.
  En effet, il tient son origine de l'ancien blason d'Amédée VIII, en 1424, le premier Duc de Savoie, établi comme prince de Piémont, titre donné à l'héritier de la famille, en ajoutant le lambel (brisure la plus noble souvent utilisée comme un signe de primogéniture) en chef du blason de Savoie. Les trois pendants du lambel rappellent les grandes familles qui ont gouverné le Piémont: Anjou, Savoie-Achaïe, Savoie. Le lambel est bleu (azur), la couleur d'origine choisie par la maison de Savoie.


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19e étape - Vendredi 29 Mai 2015 :
 Gravellona Toce - Cervinia
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Gravellona Toce (VB)
Gravellona Toce: "D'argent au château de gueules, à deux tours et deux merlons au centre, crénelés à la Gibelin, ouvert de sable, terrassé de sinople". Couronne et ornements extérieurs des villes italiennes.

La face sud du Mont Cervin ( 4 478 m.), celle qui est
 visible du côté italien, plus effrayante encore que la face
nord, côté suisse, que l'on connait mieux.
Valtournenche (AO) - commune où est
située la station de montagne de Breuil / Cervinia.



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Cervinia : c' est le nom italien de Breuil, le vrai toponyme valdôtain d'une des plus importantes stations de sports d'hiver et un haut lieu de d'alpinisme en Italie, située à 2 050 m. d'altitude. Elle a été rendue célèbre dans les années 1860/1870 pour les départs à la conquête du somment du terrible Cervin, maintes fois tentées, avec des accidents dramatiques, et quelquefois réussies, du côté italien. La Société des guides alpins du Cervin est basée à Breuil-Cervinia depuis 1865. Les guides sont eux très souvent natifs de Valtournenche, le gros bourg de la vallée.

Valtournenche:  "Parti: au premier d'azur, une montagne (le Mont Cervin) d'argent, mouvant de la pointe et des flancs, surmontée d'un piolet d'alpiniste au fer de sable, emmanché de gueules, posé en pal, le manche passant à travers un nœud de Savoie (voir explication → ) d'argent, posé en fasce; au deuxième de gueules à trois épis d'or accolés, les deux épis latéraux ployés vers les bords, au chef de sable à trois croissants d'or contournés ".  Couronne et ornements extérieurs des communes italiennes.
Région de la Vallée d'Aoste = AO 
 Regione Valle d'Aosta

Région de la Vallée d'Aoste : C'est l'emblème officiel actuel de l’administration de "la Région autonome à statut spécial"  avec son design stylisé, non conforme aux règles du dessin héraldique conventionnel, mais tout de même basé sur le blason historique: "De sable au lion d'argent, armé et lampassé de gueules". 
• L'emblème de la Région autonome de la Vallée d'Aoste reproduit l'ancien blason du Duché d'Aoste dont l'usage officiel était fait par les représentants et magistrats locaux, l'Assemblée Générale des Trois États et le  Conseil des Commis, les deux autorités placées sous la souveraineté du Duché de Savoie. Il est attesté depuis les premières décennies du XVIe siècle et maintenu sans interruption jusqu'à ce jour. La plus ancienne documentation héraldique qui a survécu, cependant, fait supposer que le lion est le symbole choisi pour représenter, comme emblème militaire, le Comté puis le Duché d'Aoste. Il englobait un territoire coïncidant avec les frontières régionales actuelles, dans une époque bien antérieure: au moins depuis la seconde moitié du XIIIe siècle et peut-être depuis la fin du XIIe siècle. L'ancien blason a été plus tard adopté officiellement pour représenter successivement l'ex-province d'Aoste (1927), puis la circonscription (1946) / région (1948) autonome du Val d'Aoste, et enfin la Région autonome à statut spécial de la Vallée d'Aoste. Statut spécial, car la Vallée d'Aoste est la seule région italienne composée d'une province unique, les deux entités étant fusionnées en une seule. C'est la seule également qui bénéficie du droit d'avoir comme seconde langue officielle le français, au côté de l'italien. La toponymie et les patronymes des habitants de la région témoignent en effet de cette francophonie très marquée, par ses liens historiques avec la Savoie ducale.


20e étape - Samedi 30 Mai 2015 : 
Saint-Vincent  -  Sestriere / Sestrières


Saint-Vincent (AO)
Sestriere / Sestrières  (TO)

Saint-Vincent: " De gueules à la figure de saint Maurice, représentée par une statue de bois au naturel, accompagné de trois croissants d'argent, un à dextre, un deuxième à senestre de la statue  et le troisième en pointe; au chef de sable chargé d'une croix tréflée d'argent.  Le saint est représenté vêtu d'une tunique courte, les cuisses nues, avec des genouillères et des jambières d'armure et la tête couverte d'un casque romain, il tient une lance avec un guidon dans la main dextre et un bouclier de profil sur le bras senestre". Couronne et ornements extérieurs des communes italiennes.
Croix de l'ordre de Saint Maurice
 et Saint Lazare
•  Saint Maurice (saint Maurice d’Agaune), dont la légende et le martyr sont localisés dans le Valais, en Suisse, donc tout près du Val d'Aoste, est le saint patron de la famille de Savoie.
• La croix tréflée est le symbole de l'Ordre de Saint-Maurice , et par extension du saint lui-même quand il n'est pas représenté en personne. C'est une figure assez répandue dans l'héraldique municipale des territoires qui ont été sous souveraineté savoyarde comme la Bresse (département de l'Ain), les deux départements de Savoie et Haute-Savoie, et les cantons de Vaud et du Valais en Suisse, naturellement.

Sestrières :  "Taillé d'azur et de sinople, une barre de sable brochant sur la partition, sur le tout, brochant, un pal d'argent chargé de deux skis de gueules adossés en pal".  Couronne et ornements extérieurs des communes italiennes.
• Cette commune est née en 1935, autour d'une nouvelle station de sports d'hiver créée par Giovanni Agnelli, le fondateur de la société FIAT. Le taillé azur/sable/sinople symbolise la pente des montagnes, le pal d'argent les pistes de descente, et la paire de skis confirme la vocation de la station.
Ville métropolitaine de Turin / Città metropolitana di Torino = TO
 (Région du Piémont)
Ville métropolitaine de Turin (site internet) : cette nouvelle entité administrative remplace l'ancienne Province de Turin depuis le 1er janvier 2015, c'est donc tout récent !  Et pour le coup, un nouvel emblème a été créé pour l'occasion, remplaçant les armoiries de province, comme on en a déjà vu beaucoup depuis ces trois dernières semaines.
 Nous avons ici un logo composé à partir du blason historique du Piémont, déjà décrit plus haut pour l'emblème de la Région. L'écu est basculé d'un quart de tour à gauche mais sans que le lambel d'azur ne bouge, et se prolonge par un rectangle bleu avec l'extrémité en demi-cercle portant le nom de  "TORINO METROPOLI" écrit en capitales blanches.



21e étape - Dimanche 31 Mai 2015 :
 Torino / Turin   -   Milano / Milan  (arrivée)
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Turin / Torino (TO)
Milan / Milano (MI)

Turin : Écu en tiers-point, d'azur au taureau furieux d'or, accorné d'argent". Couronne comtale.
• nous avons un cas exemplaire d'armes parlantes : il toro = le taureau en italien.
• les italiens appellent cette forme de bouclier : "scudo svizzero", soit un "écu suisse".
• le premier blason de Turin apparait en 1360 sur le manuscrit "Codice della Catena ", durant le règne du Comte Amédée VI de Savoie, et montre un taureau de gueules sur fond d'argent. La forme actuelle date de 1928 (en 1933, le faisceau de licteur de la période mussolinienne avait été rajouté en chef et supprimé à la fin de la Seconde Guerre mondiale).
• la ville utilise actuellement un emblème/logo reprenant assez fidèlement le dessin héraldique mais avec une couronne comtale stylisée,  hérissée de petits croissants à la place des perles.



Milan :  "D'argent à la croix de gueules". Couronne et ornements extérieurs des villes italiennes.
• à l'opposé de sa voisine, mais néanmoins rivale Turin qui a repris en 1928 une couronne aristocratique, Milan a choisi une couronne municipale, celles des villes avec une muraille à cinq tours d'or, bien que la ville ait été le siège d'un Duché important dans l'histoire de l'Europe.
• l'adoption de la croix rouge sur fond blanc remonte au XIIe siècle lorsque, comme signe d'une plus grande autonomie face à la puissance l'Empire romain germanique, et a été imitée par beaucoup d'autres villes, nous l'avons vu dans ce parcours à travers l'Italie. La légende veut que la croix ait été  adoptée par les Croisés de Milan après la conquête du Saint-Sépulcre à Jérusalem, lors de la première Croisade. Plus tard, avec le règne de la dynastie des Visconti sur le Duché de Milan, la croix a été remplacée par la célèbre guivre ou bisse (Biscione , en italien). Les armoiries d'argent à la croix de gueules ont été officialisées par une loi municipale en 1934, telles qu'elles sont visibles actuellement.
• la ville utilise par ailleurs un emblème/logo reprenant globalement le dessin héraldique mais de manière très stylisé.

Ville métropolitaine de milan / 
Città metropolitana di Milano = MI
 (Région de Lombardie)

Ville métropolitaine de Milan (site internet) : cette nouvelle entité administrative remplace l'ancienne Province de Milan, tout comme celle de Turin, plus haut, depuis le 1er janvier 2015.  Mais à la différence de Turin, et pour le moment, les anciennes armoiries de la province ont été maintenues:
"Écu samnite (ou français) d'azur : un soleil d'or non figuré, avec huit rayons ondoyants, alternant avec seize rayons droits, groupés deux par deux, chargé d'un croissant de lune de lune d'argent, contourné, posé en barre; au chef d'argent chargé d'une croix de gueules". Couronne et ornements extérieurs des provinces italiennes.
ornement de l'abbaye de Mirasole
• Ce "soleil qui a rendez-vous avec la lune", comme le chantait si bien le poète Charles Trénet, tient son origine dans un établissement religieux.
C'est en effet l'image très curieuse qui est gravée sur un chapiteau du cloître de l'Abbaye de Mirasole située dans la périphérie de Milan. Sa symbolique est néanmoins mystérieuse et sujette à interprétations multiples. La province l'a adopté comme blason mais en supprimant le visage du soleil (soleil non figuré).
• En chef : nous retrouvons le blason historique de la Ville de Milan, décrit plus haut.



 Toutes les bonnes choses ont une fin, et ce périple exceptionnel chez nos voisins et amis italiens vous aura bien distrait, je l'espère, et peut-être appris aussi quelques particularités. Cette année en effet, j'ai voulu aller plus loin dans les commentaires de chaque étape. J'ai pour cela croisé les sources et traduit moi-même énormément de textes en italien, et il est probable que j'aie fait quelques erreurs. Le voyage est je pense devenu ainsi plus intéressant à travers plusieurs thèmes : l'héraldique en premier lieu, c'est le thème général de ce blog, avec les spécificités du pays. Vous avez peut-être découvert "les monts à l'italienne", "les créneaux à la Gibelin", les couronnes patriciennes, la forme des écus samnites, etc.... Et aussi la géographie, la nature, l'histoire, les peuples natifs ancestraux, la culture, l'organisation territoriale de l'Italie et trois grandes métropoles: Gênes, Turin et Milan. Sans oublier un petit saut de puce en Suisse italophone ...
 Pour ce  qui est de la course cycliste qui servait de prétexte à l'exercice, aucune révélation n'a transpiré dans ces lignes, j'en suis désolé pour les amateurs de vélo ! Mais ceux-ci ont certainement trouvé ailleurs les réponses à leur questions.
Pour les autres ,voici le podium final :
 Classement Général ( Maglia rosa / Maillot rose) :
• 1 - Alberto Contador Velasco , espagnol (madrilène).
• 2 - Fabio Aru , italien (sarde) .
• 3 - Mikel Landa Meana, espagnol (basque).
Classement par points ( Maglia rossa / Maillot rouge) :
• 1 - Giacomo Nizzolo, italien (milanais).
Classement de la montagne ( Maglia azzurra / Maillot bleu) :
• 1 - Giovanni Visconti, italien (sicilien).
Classement du meilleur jeune ( Maglia blanca / Maillot blanc) :
• 1 - Fabio Aru , italien (sarde) .

A bientôt pour le Tour de France, le 4 juillet....


 
Crédits :
cartes : www.gazzetta.it
blasons (vous pouvez visualiser la provenance 
des dessins en passant la souris sur les images):
www.comuni-italiani.it
it.wikipedia.org
www.araldicacivica.it (dessins de Massimo Ghirardi)
merci à eux.


             Herald Dick 
 
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